[Bikepacking] – Tuscany Trail 2018 : 550 km à travers la Toscane

Introduction

Deux semaines seulement après la Gravel Tro Breizh, je remonte sur ma fusée pour une traversée de la toscane en Italie : La Tuscany Trail. Je pars avec Rémi et Capucine pour 550 km et 9000m de D+. Nous partons en mode “touriste” après nos efforts sur le tour de Bretagne afin de profiter au maximum de la toscane, de ses paysages et de ses spécialités culinaires. Nous prévoyons 5 jours soit un kilométrage quotidien de 108 km et 1000m de D+ en moyenne.

C'est quoi la Tuscany Trail ?

Créé en 2014 par Andrea Borchi, la Tuscany Trail n’est ni une course (pas de classement), ni un brevet (pas de limite de temps). C’est l’occasion de rouler à travers la Toscane Italienne en totale autonomie (ou pas en fait, on fait ce que l’on veut !). Le parcours se veut exigeant en termes de relief puisqu’il annonce un dénivelé positif de +9000m pour 550km environ. En revanche, le terrain semble roulant et accessible en témoigne les vidéos de promotion et les retours des éditions précédentes. Mais attention, ces images ne montrent malheureusement pas la totalité du parcours et nous avons été plutôt surpris pas de nombreux passages techniques ( à lire dans le récit…).

Chaque participant peut mettre en marche une application “Never Alone” qui permet aux proches de localiser les participants sur une carte.

Quelques liens :

Tuscany Trail 2017

La machine et le matériel

Quelques modifications par rapport à la Gravel Tro Breizh notamment sur la sacoche arrière, je suis passé sur une Revelate Design qui s’avère vraiment ergonomique et pratique. J’ai aussi troqué ma tente MSR pour une tente 1 place ultraLight de chez décathlon, je gagne environ 1kg. J’ai aussi pris le sac de couchage SOL Escape d’un poids de 241 g !! Je gagne 600g par rapport à mon ancien. Pour la saison estivale, c’est franchement parfait, pas de condensation et bien chaud avec un sac en coton à l’intérieur.

Sur le choix de la transmission, il est important d’avoir un ratio minimum inférieur à 1 et même à 0,80. Personnellement, je suis à 0,72. Les abandons ou les blessures sont souvent liées à un ratio trop élevé. Il est important de pouvoir tourner les jambes, de ne pas forcer, de ne pas être dans le rouge.

Il faut rouler “tranquille” mais longtemps. Pas besoin de tenir une moyenne de fou pour finir dans les temps !

“Il faut rouler tranquille mais longtemps”

La fusée

Le Récit

Prologue

Jeudi

Lors de la Gravel tro Breizh, j’avais fait le chauffeur et emmener mes compagnons de route, Rémi et Clément, cette fois-ci c’est l’inverse, c’est Rémi et Capucine qui m’embarque pour nos pérégrinations italiennes.

Le départ de la Tuscany est le samedi, nous prévoyons un départ le jeudi matin afin de faire la route en deux fois.

Jeudi après-midi, je termine de préparer ma fusée afin de prendre la route pour Lille. Au moment, d’enfourcher ma monture, mon regard est attiré par une excroissance au niveau du pneu arrière. Le flanc beige de mon WTB Nano est en train de se déchirer !!! Heureusement que je le vois juste avant partir sinon j’aurai fait ce qu’on appelle dans le jargon des bikepackeurs nordistes « une Clément ». J’ai toujours mon WTB Nano noir en tringle rigide qui a fait la French Divide 2017, il est un peu beaucoup usé mais je n’ai pas le choix… Je me retrouve donc avec un pneu beige à l’avant et noir à l’arrière, pas très esthétique…

Bref, direction Bray-Dunes puis La Panne pour atteindre la Belgique puis je trace tout droit pour rejoindre les bords de Deûle en prenant soin d’éviter les monts de Flandres. J’ai en effet une douleur importante au genou gauche, séquelles de la Gravel Tro Breizh et de Lille-Hardelot. J’atteins Lille après 90 km sous une chaleur écrasante puis je retrouve Rémi qui m’accueille chez lui. Départ tranquille demain vers 8h30.

Sur la route

Vendredi

Rien de bien intéressant, nous traversons la France puis les Alpes par le fameux Tunnel du Mont Blanc où nos conversations nous ont amené à revivre le tragique accident survenu quelques années auparavant.

En fin de journée, nous nous restaurons dans un petit village italien puis nous nous posons au bord du Lago di Viverone dans un camping où le gérant parle français puisque marié à une bruxelloise.

Samedi

Départ vers 9h pour 3h de route afin d’atteindre Massa, ville de départ de la Tuscany Trail 2018.

12h30, nous déambulons sur le front de mer de Massa. Autant être honnête, ce n’est pas très beau, c’est même plutôt moche. Impossible de voir la mer depuis le trottoir puisque les plages sont privées et bondées de parasols et de transats. Vers 16h, nous nous dirigeons vers la zone de départ : le stade de Massa où l’ensemble de l’organisation y est présente. Le site est plutôt bien organisé ! Il y un grand stade avec une pelouse où l’on peut planter les tentes, un petit bar avec de quoi se sustenter, des douches (payantes) et des vestiaires ! Le site n’est pas encore très animé mais au fur et à mesure que l’heure du briefing arrive, le site commence à fourmiller.

Comme nous sommes arrivés assez tôt, nous regardons déambuler nos futurs compagnons de route et nos yeux scrutent sans cesse les différentes montures passant devant nous ainsi que leur chargement. Nos commentaires vont bon trains, chacun étant convaincu d’avoir la meilleure configuration. Nous doutons tout de même sur quelques spécimens comme d’énormes FatBike ou ce compatriote français qui part avec littéralement une glacière en guise de sacoche avant.

Nous profitons aussi de l’après-midi pour étudier le parcours sur un superbe road book donné avec le pack participant. Tout y est, une carte et surtout les profils altimétriques qui nous confirment que le terrain sera plus que vallonné. Capucine, peu expérimentée sur les chemins caillouteux mais cycliste averti tout de même, étudie le parcours avec attention et un léger stress. Nous la rassurons en lui disant que ça ira et que ce sera roulant…

Le Briefing

18h30, Andréa Borchi prend la parole. En italien et en anglais, il nous informe que deux secteurs pourront être évités : le 1er en raison d’un éboulement et le second si le niveau de l’eau est trop important.

Un survol drone de la foule plus tard (oui on a le droit en Italie apparemment…), et chacun retourne à sa préparation. Un restaurant et une balade de 10km dans les environs qui confirmera la laideur du secteur, nous regagnons nos pénates pour une bonne nuit de sommeil.

Jour 1: On nous aurait menti ?

Enfin c’est le départ. Le réveil sonne à 6h pour ma part, le temps de me préparer un petit déjeuner. Rémi et Capucine se lève ½ heure plus tard puis nous prenons la direction du départ situé dans le centre de Massa. Nous arrivons sur la place où de nombreux participants sont déjà présents. Nous rencontrons quelques Français puis nous voyons Andrea arriver avec un haut-parleur nous annonçant que ce n’est pas la bonne place ! En effet, une centaine de mètre plus loin nous rejoignons une place bondée de bikepackers ! On a failli rater le départ… 740 cyclistes, cela fait beaucoup ! Je me dis que cela va mettre du temps pour que cela s’écrème. De toute manière, les objectifs ne sont pas sportifs, nous y allons pour profiter et prendre notre temps.

8h, c’est parti, nous partons pour la Tuscany Trail 2018, à nous les routes et Strade Bianche toscanes ! Cela bouchonne un peu mais cela reste roulant. Nous commençons par 20km de route au pied des montagnes toscanes, traversant les villages de Capanne ou Pietrasanta. A proximité du cours d’eau Lucese, la trace bifurque à l’est sur un single le long de la rivière et nous entrons dans les Alpes Apuanes, massif montagneux faisant partie intégrante des Apennins. Deux trois petits sentiers et nous attaquons notre « 1ère colline », environ 350m de dénivelé positif sur route et à notre grande surprise sur quelques singles VTT… On nous aurait menti ? Ce n’est pas forcément pour nous déplaire mais faut espérer que cela soit pas la majorité du parcours sinon cela risque d’être très dur.

Les objectifs ne sont pas sportifs, nous y allons pour profiter et prendre notre temps

Avec le monde qu’il y a, cela bouchonne souvent et la progression est plutôt lente. Après le col près de Pedona, la trace suit la crête de la montagne basculant de temps à autre sur le flanc ouest et est.

Cette première bosse se passe bien et donne un bon aperçu de ce qui nous attend pour la suite du programme. Après une descente bien gravel, nous atteignons Lucques que nous visitons à peine. Nous nous posons tout de même en terrasse pour la pause déjeuner à base de soda et de pizza. Puis nous reprenons la route pour environ 50km de plat sur de la route ou des chemins. La progression est aisée, la chaleur étouffante, les paysages plutôt sympathiques et ce n’est que le début !

Depuis le début de cette journée, nous sommes assaillis par de multiples odeurs et notamment celle du chèvrefeuille qui est quasiment constante ! Il y en a partout ! C’est vraiment agréable ! Nous roulons à notre rythme, je prends parfois le large quelques minutes puis comme je m’arrête prendre des photos toutes les 5 minutes, Rémi et Capucine me rattrapent rapidement. En fin d’après-midi, la température a raison de nous et nous nous posons un bon moment à l’ombre accompagné de nourriture saine comme des Oréos ou du Coca bien frais. Au moment de repartir, un italien nous interpelle et nous demande des nouvelles de la personne qui a fait un arrêt cardiaque… Ah bon ? Non… Pas au courant… C’est triste…

Sur ces paroles joyeuses, nous repartons tandis que le bar attenant ferme ses portes au nez et à la barbe des bikepackers arrivant.

Capucine commence à accuser le coup de la chaleur et nous décidons de rallier au moins la maison de naissance de Léonard de Vinci. A Fuccecchio, km 95, le relief est de retour et nous attaquons les vallons toscans à travers de magnifiques champs d’oliviers parsemés de coquelicots. Les chemins sont raides et pleins  de pierres, la progression n’est pas forcément évidente. Je prends le large et j’attends mes compagnons au pied de la maison natale de Leonard de Vinci. Modeste demeure où l’artiste n’y a pas fait grand-chose à part y naître…

Nous nous ravitaillons en eau puis nous décidons à partir de maintenant de se poser sur le 1er spot que l’on trouvera. Rémi tente de nous convaincre d’aller jusqu’au camping situé tout en haut de la colline mais ce n’est pas gagné, Capucine souhaite se poser au plus vite. J’émet également le souhait de faire un bivouac sauvage, c’est quand même plus sympa.

C’est toujours quand on cherche un bivouac que les spots se font rares… Juste avant il y en avait de superbes dans les oliviers mais là nous entrons dans la forêt. J’ouvre la route et pars en éclaireur dans les bois. Le chemin est assez technique par endroit et dans une descente, je repère des plateformes le long du chemin. D’ailleurs quelques mètres auparavant, un bikepacker s’est trouvé un bon ptit spot. J’attends un ptit quart d’heure et je vois arriver Capucine et Rémi. Nous nous posons donc à côté du chemin pour la nuit après une étape de 119 km. Pendant le montage des tentes, nos conversations dérivent sur les attaques de sanglier sur des campeurs en Ardèche. D’ailleurs, sur les plateformes on repère pas mal de traces correspondant à nos cochons sauvages. Au cas où, on met la nourriture dans des sacs en hauteur car s’ils la trouvent dans les affaires, ils vont tout bouloter ! Sur ce, je rejoins mon spot et lorsque j’arrive, j’entends des bruissements de feuille puis un animal qui détale avec un grognement caractéristique du sanglier… Bon… Je me couche l’oreille tendu et à l’affût du moindre de bruit.

Minuit. Je me réveille, un type passe à pied en vélo juste à côté de moi. Un bikepacker nocturne…

1h. Je dors d’un œil depuis que le type est passé et là j’entends que ça farfouille derrière moi. Le même bruit que tout à l’heure ! C’est sûr, c’est un sanglier… Mon pouls s’accélère, je ne sais pas quoi faire en fait… Je tousse un coup pour signaler ma présence. Rien, la bête s’en fiche royalement. Au bout d’un moment, les bruits cessent. Je sors et balaye les environs avec ma frontale. Rien. Pas de bruit, pas de sanglier. Je me recouche.

Jour 2: 3-2=1

Réveil 6h. Capucine et Rémi n’ont pas eu la chance d’avoir une visite de la part des sangliers. Nous repartons sur la piste qui s’avère plutôt technique en gravel. De belles descentes dans des pierriers qui nécessite de bonnes bases en pilotage surtout lorsque l’on est chargé. Mais le début de journée s’annonce plutôt sympa, nous redescendons la colline gravit hier soir puis nous filons dans la vallée le long de l’Arno, rivière qui nous amène au cœur de Firenze (Florence).

Ayant peu mangé ce matin, la voie verte le long de la rivière est interminable… Nous entrons dans Florence par l’ouest puis la trace bifurque vers le cœur de la cité. Il fait un temps magnifique, la ville se réveille à peine, il est 9H environ. Je reste déjà subjugué par l’avenue que l’on traverse, des murs gigantesques imposants, magnifiques. Puis nous arrivons sur  la Piazza del Duomo, et là, quel spectacle ! Je suis sans voix ! C’est juste impressionnant de beauté. Je n’avais aucune idée de ce que j’allais voir à Florence. Je savais que c’était réputé pour être beau mais je ne visualisais pas du tout. Capucine est au bord des larmes devant le Duomo di Firenze. C’est le graal pour les personnes comme elle, passionnée d’histoire de l’art et d’architecture.

Nous nous posons en terrasse au pied du baptistère Saint Jean, les vélos sur la Colonna di San Zanobi, pour un énorme petit déjeuner typiquement italien (d’après la carte) : un assortiment de beignet, jus de fruit, jambon cru, melon et tarte. Un régal !

C’est réellement les montagnes russes… Le terrain est tantôt roulant, tantôt technique

Après une bonne heure de pause, on se ravitaille au supermarché du coin puis on repart. La suite de la journée s’annonce ardue. En effet, le plat c’est fini, maintenant nous partons pour 350km de montagnes russes et si le terrain est aussi technique que la veille, cela risque d’être tendu !

Nous remontons un peu l’Arno en quittant Florence puis on file au sud à travers la campagne vallonnée. C’est réellement les montagnes russes… Le terrain est tantôt roulant, tantôt technique. De longues ascensions sur des chemins cabossés, jonchés de pierres, parfois à l’ombre parfois en plein cagnard. La progression est lente. Je prends à nouveau le large tandis que Rémi accompagne Capucine qui fait ses premières armes sur les sentiers italiens.

Ils me rattrapent lorsque que je suis en train de réparer la crevaison de mon pneu arrière. Au cours de la dernière descente, j’ai pris un peu la confiance et dans le virage, je me suis un peu trop penché et un silex a entaillé le pneu déjà bien usé. Le sifflement de la crevaison s’est fait tout de suite entendre.

Pneu réparé, je rejoins Capucine et Rémi. Notre progression est lente et je me dis qu’à ce rythme ce sera difficile de terminer dans les temps. Je pense donc peut être à partir tout seul et les laisser aller à leur rythme. D’ailleurs Rémi me le propose quelques heures plus tard, nous voyons bien que Capucine ne pourra pas enchainer de grosses étapes. Ils projettent déjà de changer leur plan pour la suite. Vers 15h, nous nous arrêtons dans le restaurant Caminetto del Chianti, bondé de bikepackers. Enfin, nous trouvons de quoi nous restaurer car cela fait 3h que l’on cherche à se poser. En attendant mes compagnons, je pars demander s’ils font toujours à manger. Le type tire une tête d’enterrement, apparemment au bout du rouleau et je dois insister lourdement pour qu’il me réponde juste si la cuisine est ouverte. Le mec est imbuvable.

En terrasse, sous les arbres à l’abri du soleil qui cogne fort, on mange quelques plats de pâte après un bon ¾ d’heure d’attente. Nous repartons vers 16h30 17h, la chaleur est toujours bien présente et cela reste difficile.

Nous sommes dans le pays du Chianti, des vignes à perte de vue ! Nous n’avons pas encore notre kilométrage journalier et notre progression est toujours trop lente pour finir dans les temps. Je prends donc la décision de partir tout seul afin de pouvoir finir dans les temps. Rémi et Capucine me rassure, m’en veulent pas et comprenne parfaitement. De leur côté, ils prévoient d’aller au moins jusqu’à Sienne et de voir après. C’est donc vers 18h au milieu des vignes que je dis au revoir à mes amis et que je prends le chemin tout seul.

J’atteins Sambucca, fin du secteur de la journée. Je pensais trouver quelque chose à manger mais on traverse la ville par la zone industrielle. Je continue et remonte donc le vallon pour atteindre Tavarnelle Val di Pesa où il semble y avoir plus d’agitation. Dans le centre-ville, mon regard est attiré par la présence de bikepacker devant une petite devanture. Une sorte fast-food à l’italienne. Le gars est super accueillant, souriant et me propose la spécialité du coin : le Lampredotto. Dans un anglais parfait, il m’explique que ce sont des tripes mijotées avec plein de sauces. Des tripes à la florentine en fait. Un délice ! J’arrose ça de houblons puis une fois les 100km dépassé, je me mets en quête d’un spot bivouac. Il commence à faire nuit et je n’ai pas envie de galérer.

Au détour d’une côte dans les vignes, je repère le champ en contrebas du chemin, caché par les bosquets. Je m’installe entre deux rangés de vigne, juste en dessous de la trace après 108 km et 2200m de D+. J’entendrais d’ailleurs de nombreux participants passer juste au-dessus de moi.

Jour 3: Sienne

Une bonne nuit de sommeil dans les vignes, un paysage magnifique au réveil et on repart, direction Sienne pour le milieu de journée.

Je débute par une côte assez raide où je rattrape un concurrent allemand avec qui je roule quelques minutes. Je perds sa trace lorsque j’arrive au village de San Gimignano. Le village médiéval est désert, je déambule dans les rues et ruelles étroites, c’est magnifique. J’en profite pour prendre un café sur une place somptueuse alors que le village se réveille doucement.

Je descends la colline où le village est perché et continue ma route sur la Via Francigena que l’on emprunte beaucoup depuis le début. Comme le chemin de Compostelle, cette « voie qui vient de France » est un réseau de chemins et de routes qui emmène les pèlerins de France vers Rome. Par conséquent, il traverse de nombreux villages anciens comme celui de Monteglioni où je m’y arrête à nouveau pour un café quelques viennoiseries.

Vers 11h30, j’atteins les portes de Sienne. On arrive par la banlieue sans grand intérêt… Ce n’est pas terrible mais je me doute bien qu’il y a un centre-ville historique. On y arrive assez rapidement et vu la densité de personne dans la ville, je suis obligé de descendre du vélo. Les façades sont superbes, l’architecture somptueuse et alors que je progresse dans le flot de personne, la trace bifurque à gauche sur le haut d’un escalier et s’ouvre devant moi la Piazza del Campo. Je reste sans voix à nouveau, c’est sublime ! La place entièrement piétonne forme un arc de cercle, une énorme cuvette avec en son centre la Torre del Mangia.

J’immortalise la fusée devant la place puis je continue à pied explorer la ville. J’ai largement le temps de faire du tourisme,  il est 11h et j’ai déjà 60km au compteur. Je déambule jusqu’à tomber sur une autre place avec une gigantesque cathédrale, la cathédrale Di Santa Maria Assunta. Emerveillé par la ville, j’emprunte une petite ruelle et jette mon dévolu sur un petit resto à 10€ le menu.

Je repars sous un soleil de plomb, traverse la place del Campo et quitte Sienne par la campagne et sur les fameuses Strade Bianche ! Enfin ! Ces chemins de gravier blanc tant attendu sont enfin là et c’est un réel plaisir que d’envoyer du kilomètre dessus !

Le paysage défile, les allés de cyprès si caractéristique de la Toscane sont légions, je n’arrête pas de les photographier. Ces alignements tranchent réellement dans le paysage !

Mes roues m’amènent à une nouvelle vieille ville « San Quirico d’Orcia » où je stoppe pour un ravitaillement dans un ptit fastfood. Comme d’habitude, les villes et villages sont les lieux privilégiés par les participants et cela grouille bikepackers. Les gérants des cafés sont visiblement surpris de cet afflux et ne semblent pas vraiment apprécier que l’on débarque en nombre…

J’ai 115km au compteur, largement le quota journalier sauf qu’il est 16h30. Je ne vais tout de même pas m’arrêter là ! Au terme de l’étape, il y aurait Radicofani, point culminant de la trace, ce qui sous-entend une bonne grimpette mais en regardant de plus près les profils topographiques, ça à l’air moins qu’il n’y paraît. Pourtant, la montagne que je vois à ma droite me paraît gigantesque… Le sommet est dans les nuages et d’après mon GPS, il reste maintenant que 20km pour atteindre le sommet ! Cela me parait impossible… Il y a un souci. Je me concentre un peu plus sur la carte, le GPS et l’orientation et m’aperçoit que la montagne que je prends pour Radicofani n’est pas du tout la bonne ! Je regarde trop à l’Ouest ! Ce que je vois, en fait, c’est le Mont Amiata qui culmine à 1700m alors que Radicofani n’est qu’à 800m ! Cette erreur me donne un coup de fouet et je me dis qu’il n’y a pas de soucis pour terminer là-haut ce soir. L’approche se fait par un chemin le long du Torrente Sucenna que l’on doit traverser à gué par deux fois. C’est plat, roulant et en bas du mont, c’est-à-dire à 4km du sommet, cela commence juste à monter ! Plutôt à l’aise dans les ascensions, je double une bonne dizaine de cyclistes et nous arrivons tous à Radicofani en début de soirée. La ville est déserte et au détour d’une ruelle, un restaurant ouvert, plein de vélos, un terrasse, le bonheur.

Je pose tout, m’assoit en terrasse et commande une Birra Moretti de 60cl. J’enchaine un gros menu de viande et je craque sur une autre Moretti. En attendant ma panacotta, je discute avec les autres participants, on rigole bien, il y a une bonne ambiance et je suis un peu alcoolisé… 21h30, j’attends toujours mon dessert… A ce rythme-là, je ne vais jamais partir ! Faut encore que je trouve un spot pour bivouaquer et je n’aime pas le faire de nuit… J’avais repéré toutefois un champ sur google Maps juste après le village dans la descente.

Je fais une croix sur la panacotta, règle mon dû puis je reprends la route légèrement grisé par les jus de houblons. La nuit est belle, chaude, je descends sans bruit du village et bifurque à droite dans le noir complet. A la seule lumière de ma frontale, je descends à tâtons et après un essai infructueux, je jette ma tente dans un champ juste à côté du chemin. Je me couche vanné alors que j’entends dévaler dans la nuit les autres bikepackers.

Ce que je vois, en fait, c’est le Mont Amiata qui culmine à 1700m alors que Radicofani n’est qu’à 800m 

Jour 4: Mode downhill activé

Je me réveille la bouche sèche et un peu déshydraté. Je regrette instantanément la 2e bière d’hier soir… J’ai les jambes plus lourdes que d’habitude.

Je ramasse tout et me remet en selle en espérant trouver quelque chose d’ouvert rapidement pour manger. Je m’aperçois qu’un groupe de personne a dormi dans le champ en face de moi. Je continue la descente plus motivé que jamais, un peu désappointé par le fait que mon appareil photo ne fonctionne plus mais pas le choix, faut y aller comme dirait Faf.

Il me reste 160km et le profil est normalement descendant jusqu’au pied de la presqu’île d’Orbetello. 10km après mon départ, je m’arrête pour mon petit déjeuner chez une commerçante pas souriante, à peine aimable et ce malgré le drapeau gigantesque à l’extérieur « Tuscany trail, Welcome ». Je ne m’attarde pas et reprend la route qui alterne strade bianche et départementales un peu trop passantes à mon goût.

Au bout de 30km, le relief change radicalement et la route plonge en lacet dans une vallée encaissée. Au détour d’un virage, le village de Sorano apparaît d’un coup, comme sculpté à même la roche.  Illuminé par le soleil, le village est tout simplement superbe. Je m’arrête chez un commerçant pas aimable pour un soda et je repars, traversant le village puis descendant la route qui a été taillée au milieu de la roche. En bas de la vallée, on doit tout monter par de longs lacets afin de remonter sur le plateau pour replonger 15km plus loin vers le village de Pitigliano. Cette fois-ci l’approche se fait par un chemin puis par un portage dans les escaliers à travers les venelles de la cité. La trace nous fait traverser le village par de petites rues typiques puis on débouche sur de jolies places donnant sur la vallée sous-jacente. J’en profite à nouveau pour une pause à base d’Oréo, de soda et de Pancetta. Je me suis en effet acheté il y a 2 jours un morceau de lard que je ponctionne de temps à autre. Quel délice que d’avoir du salé !

Je redescends à nouveau du village pour remonter sur le plateau en face. La vue sur Pitigliano est majestueuse !

La trace nous emmène ensuite vers l’ouest, le relief devient de plus en plus plat, le vent de la côte commence à se faire ressentir puis au niveau de Marsiliana, on longe la rivière Fiume Albegna jusqu’à Albinia. Ce sera pour moi les 15km les plus durs du séjour. Fatigué et affamé, je perds patience sur ce chemin de halage qui se transforme en chemin dans les hautes herbes où l’on ne peut pas anticiper les nids de poule… Ca tape, j’ai mal aux mains, le vent souffle fort de face, j’avance à rien.

Cette fois-ci l’approche se fait par un chemin puis par un portage dans les escaliers à travers les venelles de la cité

« J’en ai marre P**** » S’en suit une série d’insulte…

Enfin j’atteins la fin de cette section sans aucun intérêt. Objectif : trouver de quoi se restaurer à Albinia avant d’attaquer la dernière partie : la presqu’île qui s’annonce technique.

Albinia, autant le dire, c’est moche, sans âme et vide. Pas grand-chose, pas ou peu de restaurants… Des compatriotes me conseillent une sorte d’épicerie fine. Je me pose donc en terrasse et commande, mozzarella di Buffalla, salade (aux moucherons), plateau géant de jambon cru, le tout servi par un italien aimable comme une porte de prison. Je me remplis tout de même l’estomac et règle l’addition plutôt salée. Le type me balance littéralement ma carte bancaire dans les mains et « Ciao ».

Bon… C’est reparti ! Plus que 60km dont 20km de montée. On rejoint la presqu’île par un des 3 tombolos (celui du nord). Je vous laisse le soin d’aller chercher ce qu’est un tombolo. Je rattrape un groupe et me met fait emmener jusqu’à Porto Santo Stefano, au pied de l’ascension.

Vue les températures, je me pose un peu en terrasse avant d’attaquer le dur puis j’entame la grimpette.

Pffiuuuu…

Crevaison.

Je repars sous des températures caniculaires et sur des chemins de terres, gravier, pierriers. Les singles sont parfois étroits et dangereux. Les descentes abruptes et techniques demandent beaucoup d’attention. Le pourcentage des raidars m’obligent à pousser le vélo souvent.

La trace est cependant superbe, les points de vue sur la côte déchirée de la presqu’île sont fantastiques. La mer est d’un bleu profond, l’île, très végétalisée est complètement verte, les singles sont d’une blancheur éclatante et la roche apparaît souvent jaunâtre…

Le paysage et la technique font que le tour se passent plutôt bien et je prends pas mal de plaisir avec de bonnes sensations dans les descentes. Un peu trop d’ailleurs quand je n’arrive pas à éviter un nid poule. Ma jante avant tape fort ! Je me dis qu’il va falloir te calmer, s’agit de ne pas casser à 30km de la fin !

J’en vois enfin le bout lorsque j’arrive sur le port de Porto Ercole. Pause soda méritée ! Puis on quitte l’île par le tombolo du sud qui traverse une forêt de conifère assez dense.

Un dernier raidar à Ansedonia où s’alignent de majestueuses villas et on redescend vers la côte à travers des pistes de sables noirs.

Puis c’est la route et au bout, Capalbio. La fin. Petite ville, j’arrive au stade. Applaudissement, Des bikepackers çà et là. Des jeunes en roller qui tournoient sur une piste au son des musiques actuelles. Un bar. Un badge finisher. Une bonne ambiance familiale. Des sourires. Des bières. C’est fini.

Un badge finisher. Une bonne ambiance familiale. Des sourires. Des bières. C’est fini.

Epilogue

Le lendemain, je prends le train pour rallier Pise où m’attendent Rémi et Capucine. Nous repartons directement vers nos contrées nordiques.

La Tuscany Trail a été une superbe aventure, dépaysant, magnifique. Un peu déroutant au début vu le nombre de participant mais finalement plaisant. Les relations entre les participants sont toutefois moins fortes (inexistante) que sur d’autres épreuves à nombre plus réduit. Cela reste toutefois un évènement à faire au moins une fois !

Ce sera sans doute la dernière aventure cyclopédique de l’année mais beaucoup de projet pour l’année prochaine… TCR, BTR, Baroudeuse, NorthCape4000, Highlands, Ce n’est pas ce qu’il manque !

#Finisher de la #TuscanyTrail2018 en 3 jours et 18h40. Un seul mot, superbe !

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